Interview – Vrang, un voyage au cœur du Pamir avec Cédric Tassan

Sélectionné au Xplore Alpes Festival 2025, Vrang emmène les spectateurs dans l’une des régions les plus reculées du monde : le Pamir, au Tadjikistan. À travers ce film, Cédric Tassan raconte une expédition solitaire à vélo, entre cols hostiles, villages isolés et rencontres marquantes. Plus qu’un récit d’aventure, Vrang est une réflexion sur l’humanité, la transmission et la responsabilité du voyageur.

Un nom chargé de sens

Le film s’ouvre sur une symbolique forte. Son titre, Vrang, évoque deux lieux distincts qui incarnent toute la dualité du voyage.

« Vrang, c’est le nom de deux lieux qui symbolisent les deux visages de mon exploration. D’un côté, un col à plus de 5000 mètres d’altitude, austère, inhospitalier, dangereux… De l’autre, un petit village à la frontière afghane, modeste mais chaleureux, où j’ai terminé mon voyage. Vrang, c’est ce contraste : l’extrême rudesse de la montagne et l’humanité simple de ceux qui y vivent. »

Dès les premières images, le spectateur comprend que ce film n’est pas une simple aventure sportive, mais un voyage dans les contrastes et les paradoxes d’un territoire oublié.

Le choix de la solitude

Cédric Tassan n’a pas choisi le Pamir par hasard. Attiré par les zones de marge, il voulait explorer un territoire presque hors du temps.

« Je suis attiré par les territoires de marge, ceux que les cartes ignorent. Le vélo me permet de m’effacer, de me rendre vulnérable, et donc d’entrer en lien. J’y vais pour comprendre, pas pour conquérir. La solitude, c’est pour laisser la place à l’imprévu, au silence, à la vérité de ce que je traverse. »

Dans le film, cette solitude donne au spectateur un sentiment d’immersion brute : pas de filtre, pas d’artifice, juste l’homme face à la montagne.

L’hospitalité du Pamir

Si Vrang est un film de paysages, il est surtout une œuvre de rencontres.

« Leur résilience m’a marqué. Vivre à 3500 ou 4000 mètres avec presque rien, dans des conditions que beaucoup jugeraient invivables, ça forge des caractères. Mais surtout leur dignité, leur humour malgré la dureté. L’hospitalité est une question d’honneur : tu arrives comme un inconnu, tu repars comme un frère. »

À travers ces témoignages, le réalisateur dévoile une culture de la solidarité profondément ancrée, qui contraste avec l’austérité du milieu naturel.

Voyager, c’est aussi s’engager

Pour Cédric Tassan, l’aventure n’a de sens que si elle laisse une trace utile.

« Je ne veux pas être un simple témoin. Soutenir la création de camps de yourtes, c’est une façon d’aider les familles à rester sur place grâce à un tourisme respectueux. J’ai apporté du matériel, mais aussi des idées et des perspectives. Je me vois comme un passeur. »

Cet engagement personnel nourrit le film d’une dimension supplémentaire : celle du partage et de la responsabilité.

Le tourisme responsable comme alternative

Le Pamir fait face à un exode massif de ses jeunes. Pour le réalisateur, le tourisme peut représenter une voie d’avenir, à condition qu’il soit pensé localement.

« Il ne sauvera pas tout, mais il peut créer des alternatives. Tant que les jeunes ne voient que deux options — partir ou survivre — l’abandon est inévitable. Le tourisme, à taille humaine, peut redonner du sens à rester. Mais il doit naître du terrain, profiter aux familles, pas aux tour-opérateurs. »

Entre souffrance et euphorie

Le film montre aussi la dureté d’une expédition en haute montagne.

« Le moment le plus difficile a sans doute été un passage à gué, à haute altitude, avec un courant glacial et aucun droit à l’erreur. Un vrai point de rupture. Quant à l’euphorie… je préfère que les spectateurs la vivent dans le film. »

Ces instants extrêmes rappellent que l’aventure ne se réduit pas à une performance, mais se vit dans toute sa fragilité.

Des instants gravés à jamais

Si les paysages impressionnent, ce sont les rencontres humaines qui marquent durablement le réalisateur.

« Je pense à cette famille de bergers qui m’a accueilli à 4200 mètres, alors que j’étais épuisé. On a partagé un pain chaud et un beurre d’une richesse incroyable. Rien de plus simple, mais d’une intensité folle. Ces instants restent sous la peau. »

Un message universel

Au-delà de l’aventure, Vrang pose une question essentielle.

« J’aimerais qu’ils sortent de la salle avec une question simple : Et moi, qu’est-ce que je fais ? Pas forcément dans le Pamir, mais ici, chez nous. Vrang, ce n’est pas un film sur moi, c’est un appel à regarder le monde autrement et à écouter ceux qu’on n’entend jamais. »

Avec Vrang, Cédric Tassan livre un film sincère et engagé, où la rudesse des paysages se mêle à l’humanité des rencontres. Une œuvre qui dépasse le cadre de l’aventure pour interroger notre propre rapport au monde.

Vrang sera projeté en sélection officielle au Xplore Alpes Festival 2025, du 25 octobre au 2 novembre en Tarentaise.

 

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